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Zoom sur l’économie en Tunisie



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Le déboulonnage du régime de Ben Ali par une partie du peuple il y a 8 ans constitue une avancée en termes de libertés politiques pour la Tunisie mais ce constat ne s’applique pas pour la situation économique du pays. En effet, les indicateurs économiques affichent un tableau morose avec la baisse du taux de croissance, les inégalités régionales persistantes et la hausse du taux de chômage. Sans parler de la baisse du rythme de l’investissement privé et du pouvoir d’achat de citoyen, l’augmentation de ladette publique et la dégringolade du dinar. Dans cet article, nous allons faire le point sur les difficultésde l’économie des années post-révolution, les causes et ses répercussions sur l’emploi.

L’absence d’un schéma de développement approprié freine la relance de l’économie tunisienne selon le constat des économistes Ridha Gouia et Chkondali. Ces analystes estiment que le pays devrait revoir sa politique de développement s’il souhaite attirer les investisseurs et réduire en même temps le nombre croissant des chômeurs.

 Pour rappel, le secteur privé n’a cessé de faire de recrutement après la révolution. A l’heure actuelle, il atteint le plafond de ses capacités d’effectifs. Le secteur privé devrait prendre le relais du recrutement des nouveaux diplômés, mais ce secteur est aussi tiraillé par la baisse de productivité et la stagnation de l’investissement malgré les incitations et dispositions fiscales entreprises par l’Etat. Un exemple des difficultés rencontrées par les opérateurs économiques dans ce secteur est la hausse du taux directeur de la banque centrale, une mesure censée réduire l’inflation. Ainsientre 2013 à 2018, on enregistre des augmentations successives de taux en passant de 3,75 % à 6,75%.Or, les mesures fiscales et la politique de change sont loin d’être fructueuses. Au contraire, elles constituent les causes de la hausse de l’inflation et la dévaluation du dinar.Ce qui entraîne à leur tour une régression du pouvoir d’achat de 58 % environ de la classe moyenneet la croissance de l’immigration à l’étranger des cerveaux du pays.

L’analyse de ces économistes a aussi indiqué que les gouvernements après la révolution ont revu à la baisse leur budget pour le développement en passant de 26 % en 2010 contre 15 % environ en 2018. Ce qui réduit les opportunités d’investissement dans les régions où les infrastructures sont encore peu développées.

Concernantla balance commerciale déficitaire, ces experts estiment qu’elle est notamment due à la baisse de la production de phosphate qui peine à retrouver son rythme normal.Ce qui fait entrer l’économie tunisienne dans un cercle vicieux de recours à la dette extérieure pour combler le déficit.

Il est bon de souligner que 54 % des PME tunisiennes dans le secteur de l’industrie ne trouvent pas pertinentes les mesures fiscales adoptées par l’Etat selon une enquête réalisée par le Centre des jeunes dirigeants et l’Agence de promotion de l’Industrie et de l’Innovation. La plupart des entreprises sondées trouvent qu’une amélioration est nécessaire au niveau de l’infrastructure, de la disponibilité de terrains et des services d’appui. Elles considèrent également que le climat des affaires tunisien est encore peu propice au développement de leur structure et à l’entreprenariat.

Selon ces entrepreneurs, pour relancer le secteur, il faut mener une lutte contre l’informel, améliorer l’infrastructure des ports et mettre en place une fiscalité visant à la croissance de l’économie.

La dépréciation continue du dinar impacte premièrement sur le montant du Smig tunisien. Le Smig actuel converti en euros est 109 euros environ contre 142 euros en 2010. Cette perte va évidemment renflouer le budget des partenaires étrangers qui paient de moins en moins la main-d’œuvre dans les entreprises. En théorie, la dégradation du dinar est censéebooster les exportations mais force est de constater que cette politique n’apporte rien de bon sur l’économie.

Par contre, les entreprises totalement exportatrices s’engraissent librement de la dégradation du dinar alors qu’elles ne sont pas obligées de rapatrier les recettes obtenues par l’exportation de leurs produits. Les importations de biens et équipements sous le régime offshore ne sont pas payées et la Tunisie n’est pas le bénéficiaire de ces dispositions fiscales.Soulignons au passage que ces réformes des lois et de fiscalités ont été adoptées afin de satisfaire les exigences des bailleurs de fonds.

D’autre part, si la chute du dinar devrait booster des exportations, elle n’apas produit l’effet escompté car la production de phosphate et le secteur convertissable comme le tourisme patinent toujours. La hausse du taux directeur réduit aussi les exploitations des entreprises car elle impacte négativement sur le coût de leurs projets et la compétitivité de leurs entreprises. Et malgré les nouvelles dispositions sur l’investissement, l’environnement peu favorable à la création d’entreprises et la fiscalité contraignante constituent des blocages au développement du tissu industriel.Voilà pourquoi nous avons parlé d’un cercle vicieux d’endettement extérieur car les déficits tunisiens continuent à se creuser à travers les prêts auprès de FMIet d’autres instances monétaires internationales.

La morosité économique impacte évidemment sur l’opportunité de l’emploi. Même si le taux de chômage stagne dans certaines régions,chez les jeunes diplômés elle dépasse 30 %. De plus, les investissements directs étrangers ne créent pas d’emplois pour les chômeurs. La plupart des entreprises créées sont dans le secteur d’activité d’extraction de gaz ou de pétrole. Ce qui ne permet pas de créer des nombreux postes pour les jeunes. Quant aux sociétés de services, ou dans le secteur de la restauration et le tourisme, elles ne proposent que des emplois précaires qui ne permettent pas à leurs salariés de vivre décemment. Or, c’est justement pour ces causes que le dictateur tunisien a été déboulonné en 2011.En outre, l’Etat subventionne toujours les produits de première nécessité pour toutes les classes de la société alors que les ménages modestes devront subir la hausse de la TVA.

Malgré la situation économique difficile, le pays a un avenir prometteur devant lui car il fait partie des « marchés en mouvement » selon l’indice de GMCI (Global marketscomplexity index). Cet indice donne un aperçu sur la complexité et la réglementation des marchés dans plus de 80 pays du monde.Dans cet indice dévoilé dans Wall street journal, la Tunisie se situe dans le cinquième groupe en compagnie de 7 autres pays dont le Maroc, le Vietnam, la Bosnie, la Jamaïque pour ne citer qu’eux.

Toutefois, il est grand temps d’envisager des solutions politiques et économiques pour redresser la situation. Cela consiste à créer un gouvernement capable de faire une opération rapide et qui comprend l’ampleur des défis et l’état réel de l’économie. Il faut aussi octroyer des avantages spécifiques aux investisseurs privés qui font des investissements dans certaines régions. La mobilisation d’un crédit à taux zéro peut également booster les investissements productifs dans les régions tout enluttant contre la fuite de compétences. Cela réduit en même temps le taux de chômage et améliorele pouvoir d’achat. Le rétablissement de la paix sociale est aussi une priorité pour les investisseurs dans le secteur touristique, un secteur qui pourrait recruter les jeunes diplômés.Enfin, le réajustement de droits et de taxes pour certains produits permet également de lutter contre le marché parallèle.

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