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La régression de la classe moyenne en Tunisie



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Depuis 2011, la Tunisie passe par une période de crise économique due au manque d’une vraie relance économique. En effet, ces dernières années ont été marquées par le creusement de déficits, la hausse de la dette intérieure et extérieure du pays ainsi qu’une suite de réformes molles. Cette situation impacte sur la situation de la classe moyenne, estimée en voie de disparition. On enregistre une régression de 50 % de nombre des ménages appartenant à cette classe. La dépréciation du dinar, la dévalorisation des diplômes de l’enseignement supérieur, le chômage figurent parmi les causes expliquant l’impossibilité de la classe moyenne à maintenir leur rang social.

L’économie tunisienne reste vulnérable dans cette période de post-révolution. D’un côté, les statistiques affichent une forte croissance du niveau historique de la dette publique. D’un autre, il y a la hausse des chiffres de tourisme ainsi que le taux de croissance de 2,8 % au deuxième trimestre 2018 contre 2,5 % au premier trimestre. Or, il faut dire que ce taux de croissance ne se soucie pas de la dévaluation du dinar et de la hausse des prix sur le marché. En fait, l’économie tunisienne ne s’est pas encore engagée dans les réformes envisagées qui restent encore pour le moment dans le domaine de statistiques et projets. Pour débloquer le prêt FMI utile afin de décoller l’économie, il faut d’abord assainir les finances publiques. Mais actuellement, la situation économique n’est pas encore la priorité dans la politique de l’Etat.Ces changements économiques ont fini par affecter lourdement la population notamment la classe moyenne.

Cette catégorie de la population se situe entre la classe riche et la classe la plus défavorisée. Selon l’INS, elle recense les personnes dépensant entre 1090 et 6 540 dinar tunisien au prix de la valeur du dinar en 2000. Ce groupe socioprofessionnel regroupe les fonctionnaires, les salariés privés, les petits chefs d’entreprise... En 1984, cette classe moyenne représentait 84 % des habitants contre moins de 50 % en 2018. Les principaux indicateurs de leur régression sont la perte du pouvoir d’achat, le compte débiteur, la privation de viande sur la table, l’endettement des ménages… 15 % des salariés n’ont plus de reste à vivre avant le 15 du mois, 40 % des salariés ont un compte dans le rouge.

L’endettement de la classe moyenne est évalué à 260 % selon le propos du président de l’ITES. En fait, entre 1970 à 1980, cette classe a bénéficié des mesures économiques et fiscales avantageuses qui les ont permis à accéder à l’investissement. Pendant ces années, les ménages dans la classe moyenne pouvaient faire des économies, acquérir un logement, accéder aux loisirs… Mais la crise de pétrole de 1979 ainsi que le plan d’ajustement structurel de 1986 portant sur la tendance libérale économique ont déstabilisé cet équilibre. La libéralisation a bloqué l’ascension sociale de bas de l’échelle à la couche moyenne et a accentué les inégalités et l’affaiblissement du corps de la classe du milieu. Un petit nombre se sont montés vers la classe supérieure suite à la valorisation de leurs activités dans l’assurance, informatique, ingénierie, communication etc. Mais la majorité des salariés sont tirés vers le bas, et elle souffre d’une baisse de pouvoir d’achat et d’un fort endettement. Les ouvriers, les agriculteurs subissent aussi le même sort. Les bénéficiaires du capitalisme tunisien depuis 1986 sont une classe à part. En fait, une forte croissance de l’économie conduit à une mobilité sociale montante mais, à l’inverse, une faible croissance mène au démantèlement de certaines couches sociales.

Les causes de cette régression de la couche sociale moyenne en Tunisie sont multiples. En premier lieu, elle souffre de l’état fragile des statuts de salariés. Et ce depuis la mise en vigueur du PAS et du libéralisme dans les années 90. La révision du code de travail de l’année 2006 facilite aussi le recrutement et le licenciement des salariés. Elle favorise même les contrats à durée déterminée dans les sociétés offshores. Les stages payés par un salaire de misère pendant quelques mois aux diplômés avant de les chasser pour embaucher un autre diplômé est un exemple de l’exploitation de la main-d’œuvre. Or, la baisse de salaire, le manque d’opportunité favorisent l’inégalité sociale. L’autre cause de cette baisse du pouvoir d’achat de la couche moyenne, c’est aussi la hausse du chômage des diplômés universitaires et ceux de l’enseignement supérieur. En 2009, les chômeurs diplômés étaient au nombre de 135 000,au deuxième trimestre 2018, ils sont au nombre de 218 000. Les personnes les plus frappées par le chômage sont celles dans la classe moyenne. L’éducation et les diplômes universitaires sont remis en cause.

La troisième cause évoquée, c’est la baisse de la valeur du dinar qui impacte sur le pouvoir d’achat des ménages. Ce qui fait que les hauts cadres se rétrogradent progressivement à la place de la classe moyenne. Cette dernière devra migrer vers les petites villes afin de survivre et de mieux faire face à la hausse du prix du loyer et des vivres au risque de se priver des avantages comme l’accès aux loisirs, l’accès à la santé… Certes, le gouvernement essaie de limiter l’effet néfaste de l’inflation en effectuant des opérations de contrôle de prix et en luttant contre la contrebande, mais cela ne permet pas d’améliorer le pouvoir d’achat de la couche moyenne. Les produits subventionnés comme l’huile végétale manquent sur le marché. Ces produits se trouvent dans les circuits de spéculation. On enregistre également une pénurie de lait et des œufs. Cette situation continue à se dégrader pour l’année 2019 si l’Etat ne prend pas de mesures adéquates.

Le taux de chômage en 2017 est estimé à 15,5 %. Cette année au deuxième semestre, elle a reculé de 15,4 %. Chez les diplômés de l’enseignement supérieur, on enregistre un recul de 2 points passant de 31,3 %en 2017 contre 29,3 %cette année selon les résultats de l’enquête nationale sur l’emploi. 50,2 % de la population en âge de travailler sont représentées par les femmes. Mais seulement 28,2 % d’entre elles sont comptés dans la population active.

La gent féminine diplômée de l’enseignement supérieur est plus touchée que la population masculine. En effet, le taux d’inactivité est deux fois plus important chez les femmes que chez les hommes. Cela pourrait s’expliquer par le fait que 67 % des diplômés de l’enseignement supérieur en 2015 sont des femmes. L’institut national de statistiques (INS) indique aussi que les filles diplômées de l’enseignement supérieur en chômage au cours du premier trimestre est de 38,7 % contre 18% pour les garçons. Or pour contourner la régression sociale, il faut travailler.

Le déclassement social et l’appauvrissement sont en effet imputables au chômage. Si dans un foyer d’une classe moyenne, personne ne travaille, ils n’ont évidemment pas de quoi se nourrir convenablement. Et ils finiront aussi par ne pas avoir de quoi à payer un toit décent. Bref, le gouvernement devrait promouvoir l’investissement et le nombre d’emplois créés dans les secteurs de l’industrie, de services, de l’informatique etc. pour lutter contre ce phénomène de régression de la classe moyenne.

La baisse du pouvoir d'achat et la hausse des prix sont des phénomènes souvent associés aux périodes de crise financière. Plusieurs facteurs peuvent contribuer à cette situation, et ils interagissent de manière complexe. Voici quelques explications générales :

 

Inflation : En période de crise financière, l'inflation peut augmenter. L'inflation est la hausse générale des prix des biens et services. Lorsque les prix augmentent, le pouvoir d'achat diminue, car la même somme d'argent ne peut acheter qu'une quantité moindre de biens et services.

Chômage : Les crises financières s'accompagnent souvent d'une augmentation du chômage. La perte d'emplois ou l'incertitude liée à l'emploi peuvent réduire les revenus disponibles, ce qui diminue également le pouvoir d'achat.

Restriction de la monnaie : Dans certaines circonstances, les crises financières peuvent entraîner une dépréciation de la monnaie nationale. Cela peut rendre les biens importés plus coûteux, contribuant ainsi à la hausse des prix.

Restrictions budgétaires : En période de crise, les gouvernements peuvent être contraints de mettre en œuvre des mesures d'austérité, réduisant les dépenses publiques. Cela peut affecter les services publics et les transferts sociaux, entraînant une diminution du pouvoir d'achat pour certaines catégories de la population.

Crédit restreint : Pendant les crises financières, les institutions financières peuvent être plus réticentes à accorder des prêts. Cela peut rendre plus difficile l'accès au crédit pour les ménages et les entreprises, limitant ainsi leur capacité à consommer et à investir.

Fluctuations des marchés : Les marchés financiers peuvent être volatils pendant les crises, ce qui peut affecter la valeur des actifs détenus par les individus, comme les actions ou l'immobilier. Une diminution de la valeur de ces actifs peut réduire la richesse des ménages, influençant ainsi leur pouvoir d'achat.

Psychologie économique : Pendant les périodes de crise, la confiance des consommateurs peut être affectée, ce qui peut les amener à réduire leurs dépenses. Une baisse de la demande peut entraîner une baisse de la production, mais également une pression à la hausse sur les prix pour certains biens et services.

Il est important de noter que l'impact sur le pouvoir d'achat peut varier en fonction des politiques gouvernementales, de la nature de la crise et d'autres facteurs spécifiques à chaque économie. Les réponses politiques, telles que les mesures de relance économique et les politiques monétaires, peuvent jouer un rôle dans l'atténuation de ces effets. Même en période de crise la fonction publique en Tunisie lance des concours nationaux pour les nouveaux diplômés. 

Le marché parallèle, également connu sous le nom de marché noir ou marché informel, fait référence à un secteur économique qui échappe aux régulations et aux contrôles gouvernementaux. Ce marché peut inclure des activités telles que la contrebande, l'évasion fiscale, la contrefaçon, la vente de produits contrefaits, et d'autres transactions qui ne sont pas déclarées aux autorités compétentes. Voici quelques dangers potentiels que le marché parallèle présente pour l'État :

Evasion fiscale : Les activités du marché parallèle sont souvent caractérisées par la non-déclaration des revenus et la fraude fiscale. Cela prive l'État de recettes fiscales importantes, ce qui peut compromettre sa capacité à financer des programmes publics, tels que l'éducation, la santé et les infrastructures.

Perte de contrôle : Le marché parallèle opère en dehors des canaux officiels de régulation, ce qui signifie que l'État a moins de contrôle sur ces activités. Cela peut conduire à des distorsions économiques, à la perte de transparence et à des difficultés pour l'État à surveiller et à réglementer l'économie de manière efficace.

Déstabilisation de l’économie : Les activités du marché parallèle peuvent perturber l'équilibre économique en créant des distorsions, en favorisant la corruption et en sapant la concurrence équitable. Cela peut entraîner une déstabilisation économique et affaiblir la confiance dans les institutions gouvernementales.

Impact sur la croissance économique : Lorsque les activités économiques importantes se déplacent vers le marché parallèle, la croissance économique peut être entravée. Les investissements légitimes peuvent être réduits, et les entreprises formelles peuvent être désavantagées par rapport à celles qui opèrent dans l'ombre.

Sécurité publique : Certains produits du marché parallèle peuvent représenter des risques pour la santé et la sécurité publiques. Par exemple, la contrefaçon de médicaments, les produits alimentaires non réglementés, ou d'autres biens de consommation peuvent être dangereux pour les citoyens.

Dégradation des institutions : La prolifération du marché parallèle peut contribuer à la corruption en encourageant des pratiques illégales et en sapant la confiance dans les institutions gouvernementales. Cela peut avoir des répercussions à long terme sur la gouvernance et la stabilité politique.

Perte de confiance : Lorsque les citoyens perçoivent que l'État n'a pas le contrôle sur l'économie, cela peut entraîner une perte de confiance dans les institutions gouvernementales. Cela peut avoir des conséquences néfastes sur la stabilité sociale et politique.

Pour faire face à ces dangers, le gouvernement tunisien peut mettre en œuvre des mesures visant à réduire le marché parallèle, telles que des réformes fiscales, une amélioration de l'application des lois, une promotion de la transparence économique, et des incitations pour encourager la formalisation des activités économiques. Le gouvernement devrait développer ses relations internationales sur le plan économique à travers les chambres de commerce afin de mettre en avant les produits tunisiens afin de cibler de nouveaux marchés.

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